Sidobre terre de légende

La présence humaine en Sidobre

Par rapport aux autres contrées de France (Dordogne notamment...), il y a très peu de vestiges préhistoriques dans le Sidobre. Toutefois, une hache de bronze a été retrouvée au pied du roc de Peyremourou, dont la tradition fait un lieu de culte, entre Luzières et Ferrières. Une pierre taillée a été retrouvée dans la balme du chaos de St Salvy et des débris d'amphores romaines ont été mis à jour à Ruscayrolles en 1865. Ce sont les seules exceptions car aucun autre site n'a révélé depuis d'autres vestiges. C'est donc trop peu pour confirmer la présence d'habitat permanent.

 

Il existe 2 menhirs, l'un d'eux se trouve près de la Glévade et l'on prétend qu'il s'agirait d'un dolmen ou autel pillé, dont les autres parties ont disparu. L'autre, plus récemment reconnu se dresse aux abords du chaos de Feuillebois.

 

Par contre, le pourtour du Sidobre a révélé des traces d'habitat préhistorique à Burlats, celtes à Sainte-Juliane, de l'époque de la Tène à Lacalm près de Roquecourbe, et trois menhirs sont connus à la limite est du plateau granitique.

En somme, le Sidobre et son climat rude et ingrat, n'a été qu'une région de passage.

Les citations les plus anciennes des localités sidobriennes remontent au codicille de 972 dicté pat Garsinde de Narbonne, épouse de Raymond PONS, comte de Toulouse : villa de Calme-Gruarié (Guior ), Saint-Pierre de Burlats, cette dernière localité étant devenue importante au XIIème siècle.

Plus tard, le Sidobre a été le théâtre des guerres de religions. L'on a vu les exploits des camps opposés, de Guilhot et de Jean de Nadal, de Lézert, qui au XVIème siècle, s'illustra sous le nom de "Lacrouzette". Ils furent tour à tour gouverneurs de Castres selon la faveur des combats.

Malgré l'édit de Nantes, la guerre reprit en 1921 par le gendre de Sully, le Duc de Rohan. Une bataille eu lieu à Lacrouzette le 1er juillet 1625. Pendant 3 ans, la regions souffrit de pillages et de destructions.

 

A la fin de la guerre, les habitants du Sidobre ne trouvèrent pas la paix pour autant. La révocation de l'Edit de Nantes provoqua une nouvelle période de trouble et en 1685, le bois de Montagnol entre Vabre et Lacaze, cachera les premières assemblées clandestines. Ainsi, de nombreux protestants durent quitter le secteur, parmi eux, les Bruniquel de Térondet, de Gartoule, de Cambon, Pélissier-Dugrès, Malzac, Fosse, Mauzy, Auque.

Pendant cette période, il y eut de nombreuses exécutions, de maisons démolies et des biens confisqués. La signature de l'Edit de Tolérance par Louis XVI en novembre 1787 mit fin à cette sombre époque.

 

La révolution de 1789 fit à nouveau du Sidobre l'asile des proscrits. Ses contreforts pentus n'ont pas été franchis par les nouvelles idées et les prêtres réfractaires se réfugièrent dans les maisons pieuses ou les balmes de granit comme la "balme de la Gleïzo" près de Ricard, le chaos du Roc près de Lafontasse où se cacha l'abbé Astruc, vicaire d'Anglès, la grotte de St Dominique abrita le père d'Imbert.

Tous ces faits aggravèrent la pauvreté du plateau jusqu'à la fin du XIXème siècle. Et l'habitant, devant composer avec une mince de couche de terre arable, n'a pu se lancer dans l'agriculture. Il se rabattait alors sur l'abattage du bois ou l'élevage d'ovins. Ces dernières entretenaient les paysages du Sidobre "à ras" et lorsqu'ils disparaissairent, les bois prirent le dessus dans les années 70.

Les seigneurs du pays avaient aussi favorisé le développement des meuniers-ferriers. D'où les toponymes de Ferrières, la Ferrière nous rappellent que des moulins à fer, de par la présence de mines de fer du lacaunais et de la vallée de l'Agoût s'étaient implantés dans le pays. Hélas, ils ont contribué à sa désolation en provoquant le déboisement et, vers la fin du XVIIIème siècle, les fours à la catalane s'éteignirent sur le plateau.

 

Au fil des années, le paysan blasé de cette dure labeur qui rapportait bien peu se tourna progressivement vers le métier de carrier, bien plus gratifiant pour honorer les fins de mois.

Au départ, le granit a fourni le matériau de base des constructions, parfois adossées à un rocher, histoire de faire l'économie d'un mur.

Petit à petit, le granit du Sidobre fut utilisé pour les meules de moulin, les pierres à foyer.

Au milieu du XIXème siècle, le développement des communications et des moyens de transport ont favorisé le démarrage de l'industrie du granit.

Les carriers commençèrent alors à s'installer autour de la Peyro Clabado.

 

Ce développement, bien que modeste, nécessita quelques règlements. Les décisions de la municipalité de Lacrouzette de 29/10/1835 et 10/05/1844, divisaient les terres communales en cultures et dépaissances, créant même une taxe d'extraction de la pierrre.

Après la révolution de 1848, la jouissance des communaux fut affranchie de ces taxes, et ce afin d'éviter des troubles.

Les progrès de la technique lents jusqu'en 1939, furent accélérés au sortir de la 2ème guerre mondiale. C'est là que l'exploitation du granit en Sidobre atteignit un stade industriel.

Avec cet outillage modernisé, les carriers débitèrent en monuments funéraire, bordures de trottoir....les granits de toutes provenance, chacun ouvrait alors sa propre exploitation.

Pour régenter tout cela, un "schéma d'exploitation et d'aménagement" du Sidobre avait été étudié. Il avait fait l'objet de nombreuses concertations entre la profession, les élus, les propriétaires terriens et l'administration.

Ce schéma prévoyait plusieurs zones : celles dans lesquelles les carrières pourraient s'ouvrir sans d'autres contraintes que celles prévues par le code des mines ; celles dans lesquelles des précautions supplémentaires devraient être prises et enfin, celles où seraient totalement interdites toute exploitation en raison de leur intérêt touristique/géologique évident.

 

Si ce plan avait été appliqué, il aurait permis de faire cohabiter intelligemement le tourisme et l'industrie en Sidobre....

 

 

Pour moi, pour nous, le Sidobre sera toujours cette terre où nous partions, encore jeunes, à l'aventure pour découvrir les rochers qui tremblent, les chaos et les jolis coins ombragés parcourus par de frais ruisseaux.

Je ne résiste pas à citer la préface d'Etienne GRILLOU qui décrit si bien la philosophie du Sidobre (dans le guide "Le Sidobre" d'André COLRAT & DENIS) :

 

"...Le Sidobre, c'est la nature défiant la raison humaine, posant un rocher énorme sur un socle fragile, permettant à l'enfant de mettre en mouvement un bloc pesant, élevant jusqu'aux nues des superpositions menaçantes. Le Sidobre, c'est la solide colonnade d'une hêtraie odorante ; c'est le filet tombant dans une conque sonore, musant sur le lit de mousse puis jouant à cache-cache entre les pierres bizarement affrontées d'un chaos, c'est le hameau ruiné à côté de la carrière abandonnée...C'est surtout cette région si petite et encore si peu connue où l'on a la joie de découvrir sans cesse des phénomènes naturels, des sites vierges admirables."

 

Pour combien de temps encore aurons nous le plaisir de faire ces découvertes ?

Un pays aussi exceptionnel, au caractère aussi fortement marqué, ne mérite-il pas quelques égards ? Ne mérite-t-il pas d'être aimé, protégé, montré (au travers de ce modeste blog par exemple...).

Tous ces rocs étranges, risquent d'être vaincus par les hommes...La génération baby-boom, la suivante, auront-t-elle la responsabilité d'avoir laissé détruire un patrimoine naturel et unique venu du fond des siècles ?

 



03/04/2012
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